Pensées à Da Moh Le Maçon, Da Moh l'ancien immigré


Il vient de rendre l'âme ce soir à l'hôpital de Tigzirt. Il s'agit de Mohamed Raffai, connu sous le patronyme de Mohand Moh N'Amar.
Il était un ancien immigré et un maçon connu au village et dans la région.

Da Moh avait quitté la France en 1981. Il est rentré, avec comme trophée, une Renault 4 TL.
Comme beaucoup d'autres, il a  été trompé et induit en erreur par les chants de sirène, émanant d'un pays trompeur, instable, qui se cherche toujours. Il était induit en erreur par une propagande absurde, une communication trompeuse, qui voulait faire croire que l'Algérie est un pays en plein décollage, en plein développement sur tous les plans.


Mais le piège s'est vite renfermé contre lui. Trois ans à peine, la crise économique, plutôt la réalité a gagné le pays. Da Moh, s'est retrouvé dans le métier de maçon au village et dans la région.
La crise économique avait provoqué en Algérie, une explosion , un soulèvement en octobre 1988. Cela a conduit à l'ouverture vers une fausse démocratie. C'était l'ultime poison jeté vers le peuple, en mélangeant tout délibérément. Les islamistes ont grandi sous l'aile du système depuis longtemps. En 1988, ils étaient déjà très forts. le jeu démocratique n'a fait que multiplier leurs forces, pour dominer presque tout le pays, supplanter le système et même arriver aux seuils du pouvoir suprême et imposer en Algérie un Etat islamique.

Tout ce jeu malsain et dangereux avait abouti vers une guerre civile impitoyable et dont la facture macabre était de plus de 200.000 morts et des milliers de blessés et de disparus.
Da Moh, en plus de sa Renault 4 blanche, avait prit avec lui dans le bateau un autre trophée cher à tous les kabyles. Il s'agit d'un fusil de chasse.
En Kabylie d'antan, on comptait souvent plus le nombre de fusil que le nombre d'hommes

Da Moh avait cru que revenir de France après une longue absence et acheter un fusil, faisait plus partie de la tradition kabyle et algérienne. Il avait pensé s'en servir pour chasser de temps en temps et la brandir lors des différentes occasions heureuses, à l'exemple des naissances, et des autres fêtes de famille, pour ainsi booster l'ambiance et partager la joie et le bonheur avec les siens.

Finalement ce fusil, comme tous les autres, ont servi pour autre chose, plus importante, et déterminante. Ils ont été utilisé pour défendre l'honneur du village, la dignité de la région et sauver in entremis toute une république d'un effondrement annoncé.
Et comme un hasard, son village s'est retrouvé parmi les premiers à se mobiliser pour faire face çà toute une folie idéologique qui était déterminé pour renverser la république, sous le parrainage d'un islamisme international.

Da Moh a ses débuts de retour aux bercails s'est lancé dans le métier de maçon, commençait à découvrir le vrai climat général qui régnait au pays. Il n'était plus le même que celui d'antan et encore très loin de l'environnement connu en France.
En tant que maçon il était souvent en binôme avec Moh U lhucine (Atalaoui), un grand maçon de la génération précédente.
Da mohand était tourmentait par ses dégradations vertigineuses, le recul des valeurs, le manque de confiance, la déstresse permanente et la déliquescence dans lesquels le système, dans le seul intérêt de se maintenir, avait fait plonger tout un peuple.

Et pourtant ce peuple est parmi les meilleurs au monde. Il venait à peine de sortir victorieux d'une grandiose révolution. Mais juste après l'indépendance, d'autres événements commandités de loin, ont tout faussé et ont fait replongé le peuple dans un labyrinthe sans fin.

Da Moh se plaignait presque sans cesse. Il était révolté. Il ne cesse de se confiait à son ami : " Ahya Da Moh lhuss, i frança macci akkagh. (Oh cher grand frère Moh Lhuss, en France c'est différent).
Il se sentait souvent impuissant et impossible de s'adapter à ce nouveau climat, ce chaos psychologique, sociologique et politique dans lequel  on a fait plongé le pays.
Da Moh se sentait blessé sans cesse, car il avait un coeur tendre, juste, humaniste, respectueux et dans cet environnement, il se sentait harcelé sans fin.

Da Moh, après tant de travail dur; avait fini progressivement par perdre ses forces. Heureusement que la petite pension de France est venue le soulager d'un tant soit peu socialement, mais psychologiquement; aucune fortune ne peut le soulager et ne peut faire rétrécir cet écart monumental entre la société française et la société algérienne, malgré elle.
Ces jours ci les jeunes du village ont lancé plusieurs jours de volontariat pour le nettoyage des cimetières du village. C'était comme un signe, un appel, pour nettoyer le chemin devant lui, partir comme un grand vers le lieu de repos éternel.

Une autre fois, nous présentons à sa famille, nos condoléances les plus sincères et nous prions Dieu de l'accueillir dans son vaste Paradis

A Dieu nous appartenons, à Lui nous retournons
Repose en paix Da Moh !
Mayache Infos

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